samedi 15 novembre 2014

Le "trop-plein de vide" de l'espace d'exposition



Parfois je m'intéresse beaucoup plus à la scénographie des expositions contemporaines qu'aux oeuvres en elles-mêmes. Je trouve le vide tellement puissant dans les musées qu'elle agit souvent plus sur moi que certaines oeuvres. Cette conception contemporaine de l'exposition où les murs blancs subordonnent les murs colorés du XIXe siècle, c'est ce que l'on appelle le White Cube. Que l'on aurait pu appeler aussi Empty Cube dû, parfois, au nombre infime d'oeuvres exposées. Néanmoins l'essentiel, ici ce n'est pas les oeuvres prises indépendamment les unes des autres, mais le lieu d'exposition où s'inscrivent et prennent sens les oeuvres. L'espace en lui-même est donc devenu objet de création et de contemplation que Brian O'Doherty a développer dans son libre White Cube (tout bêtement) qui influença le travail d'artistes, de galeristes, et de critiques. 

Voici donc quelques photos sur ce que j'aime à photographier quand je vais visiter des expositions. Et sur ce qu'une grande partie des spectateurs ne supportent pas, spectateurs plutôt tournés vers l'art classique où des peintures de paysage et de portrait se succèdent sur les murs... Ce que j'aime bien qualifié de trop-plein de vide, c'est-à-dire une absence exagérée d'oeuvres dans un lieu immaculé censé être lieu d'exposition, et donc plein. Mais ce vide est une force en grande abondance qui ne demande qu'à être employée dans la création du XXIe siècle.  


Au centre d'art contemporain de Cracovie

Au Pavillon de la Sécession à Vienne

Au Mumok, musée d'art moderne à Vienne


Quand je repense à mes années de licence en Arts plastiques, la notion du vide m'a souvent intrigué. Elle fut souvent le sujet de mes dossiers ou de mes productions puisque je voulais chercher à comprendre comment l'on pouvait ressentir, retranscrire une sensation de vide dans un lieu où même l'architecture, les couleurs, la lumière ou des personnages sont tout de même présents. Cela peut paraitre paradoxal. Mais bien souvent c'est l'oeuvre du génie que de susciter les profondeurs du néant en usant de nombreux éléments picturaux ou graphiques.

L'oeuvre d'Edward Hopper en est un bon exemple. Souvent le vide rentre en résonance avec la sensation d'absence, bien que la palette de l'artiste y soit vive et lumineuse. La lumière est sujet du tableau et bien souvent les personnages sont plongés dans leurs pensées, dans leur plus profonde inconscience, se laissent ainsi vivre et deviennent alors "automates". Ils sont reflet du lieu qui les entoure. Je citerais aussi Anish Kapoor et sa Descente aux Limbes réalisée à Cassel en 1992. Un simple trou noir et des murs blancs. En plus de nous inscrire dans un lieu vide, Anish Kapoor semble proposer au spectateur de se pencher ou de se jeter dans les abysses de l'univers... Une belle mise en abyme du lieu. 


Edward Hopper, Automat, 1927



Early Sunday Morning, 1930

Sun in an Empty House, 1963 (une merveille)


Anish Kapoor, Descent into Limbo (« Descente aux limbes »), 1992

Anish Kapoor, Descent into Limbo (« Descente aux limbes »), 1992


Que serait cet article sur la notion du vide sans évoquer Yves Klein et son exposition le Vide de 1961 ? Au sein de sa pièce, c'est un vide matériel que l'on ressent, un vide que nous savons "présent" puisque symboliquement représenté à l'extrême par des murs totalement blanc du sol au plafond et entre 4 murs donnés à voir par une simple lumière au plafond. Ce lieu, pourrait-on dire, est une source de plénitude religieuse afin d'atteindre l'absolu. On rentre ici dans le sacré mais, il en va cependant de cette oeuvre comme une rupture radicale dans l'Histoire de l'art où le rien devient art ce qui peut susciter nombre de controverses... 


Yves Klein, Le Vide, janvier 1961. Villa Haus Lange de Krefeld (Allemagne)




Et vous, vous réagissez comment face à ce "trop-plein de vide" des expositions d'art contemporain ?

4 commentaires:

  1. Un peu comme le silence en musique... le vide prend son sens aux côtés du plein... ce qui rappelle le Tao qui considère c'est le vide qui donne tout son sens à la cruche...
    En tous les cas, la notion du vide trouve ici de belles illustrations, ce qui, a priori, semble être un exercice impossible !

    RépondreSupprimer
  2. Yes, wonderful photos with pretty outlooks showing empty! I love the second one!

    RépondreSupprimer
  3. Lovely photowork, well done!
    My latest post at: http://hanshb.wordpress.com/

    RépondreSupprimer
  4. Justement les endroits d'exposition se doivent de se remplir de " sensation de vide" pour pouvoir y accueillir certaines oeuvres souvent "trop" encadrees. Difficile d'extrapoler les cadres pour n'avoir d'oeil que pour l'oeuvre.
    Il vous faudrait donc avoir acces aux lieux d'exposition avant que les oeuvres n'y entrent. :-)

    RépondreSupprimer